Un calcul
« J'avais tout calculé pour être sûr de pouvoir jouer ce tour de coupe », admet l'ancien caennais. Ironie de l'histoire, son plan est tombé à l'eau en raison des mauvaises conditions météorologiques de fin d'année 2009. Menacé de suspension en cas de nouvelle sanction arbitrale, Baptiste Guyonnet, déjà averti à deux reprises, s'était employé à écoper d'un nouveau carton jaune en championnat sur le terrain du Racing Levallois le 5 décembre. En cas de qualification lors du 8e tour de la Coupe à Cherbourg, « je devais ainsi être suspendu face à Mantes en championnat » et disputer tranquillement le 32e tant attendu.
Raté. Un seul des deux critères a été rempli. Guyonnet a bel et bien éliminé ses anciens camarades de jeu cherbourgeois ; mais le froid et la neige, invités d'avant trêve, ont contraint au report de la rencontre en banlieue parisienne, repoussant par là même ladite suspension à un certain samedi 9 janvier, jour de Coupe, de ce fameux 32e de finale.
Bref, « mon calcul n'était pas le bon, regrette Guyonnet. Quand je l'ai appris, j'étais un peu déçu. Mais bon, c'est le football... » Cette même discipline qui l'amènera samedi à laisser ses crampons aux vestiaires pour enfiler la tunique du parfait supporter dans les tribunes de Fenouillère. En attendant, « je me prépare avec le groupe, poursuit Guyonnet. On a repris l'entraînement dimanche matin. On a bossé physiquement en début de semaine avant de procéder à la mise en place tactique. En ce qui me concerne, et sachant que je ne jouerai pas, j'essaie de mettre de l'allant, de motiver les joueurs ».
Un piège à éviter
Inutile d'aller chercher l'envie bien loin, les Avranchinais ayant rendez-vous avec l'histoire du club. Une qualification, face à Saumur, constituerait une première pour le club du président Gilbert Guérin qui n'a jamais atteint les 16e de finale de la Coupe de France. « On y croit vraiment, concède Guyonnet. Maintenant, que ce soit une CFA2 comme Saumur ou une équipe plus huppée, la coupe, à ce niveau-là, c'est du 50-50. Il faudra se méfier de cette équipe qui est parvenue à éliminer, entre autres, une Ligue 2 (Châteauroux). »
Sur le papier, les Avranchinais, évoluant un échelon au-dessus, auront bien entendu la faveur des pronostics. Le piège ¯ le milieu de terrain sud-Manchot le connaît ¯, consisterait à se voir un peu trop rapidement au tour suivant comme l'avaient pensé ses anciens camarades de jeu cherbourgeois. « Certains d'entre eux m'avaient appelé pour me dire qu'ils étaient déjà en train de calculer la prime qu'ils décrocheraient à l'issue de leur parcours en Coupe avant de nous rencontrer », se souvient Guyonnet. Depuis, on connaît l'histoire. Ce sont bel et bien les Cherbourgeois qui ont payé l'addition.
À cause de la neige, le stade René-Fenouillère aura été une des treize surfaces de jeu où, le week-end dernier, on a été contraint de reporter les rencontres. La commission fédérale s'est réunie lundi, elle a fixé le match Avranches - Saumur à samedi prochain (16 h), le vainqueur étant appelé à recevoir Rennes une semaine plus tard. Donc tout s'arrange ? Zivko Slijepcevic, l'entraîneur avranchinais, aimerait le dire, mais il a une équipe à préparer et depuis le 3 janvier, date de la reprise de l'entraînement, il avoue que c'est compliqué : « On s'est entraîné sur la neige, on est allé en salle, on s'adapte... »
Sur le synthétique, à condition qu'il redevienne praticable, un match amical est annoncé. Car Saumur, c'est le futur immédiat. Et pour se qualifier, les Avranchinais ont besoin de retrouver leurs repères. Leur plus récente prestation ? Le 12 décembre à Cherbourg, en coupe là encore. C'est loin. Mais Saumur est dans le même cas. « Le 19 décembre, notre journée de championnat avait également été remise », rappelle Patrice Sauvager, l'entraîneur de la formation du Maine-et-Loire.
À Saumur, pas de neige mais du gel
Consolation donc, l'hiver a frappé pour tout le monde. Au bord de la Loire aussi, les sols ont été durcis par le gel. « Il n'y a pas de neige, reprend Patrice Sauvager. Mais on a des conditions polaires. Il fait -7, - 8. C'est très difficile de s'entraîner. Mais c'est le foot en janvier. Heureusement que l'on dispose d'un synthétique. Ça, c'est une aubaine. »
La différence, donc, avec les Avranchinais, c'est que Saumur n'a pas eu besoin ces derniers jours de se convertir au futsal. Dans le Maine-et-Loire, les conditions ne sont pas idéales mais les entraînements se déroulent presque dans les conditions du direct. Patrice Sauvager a prévu, comme d'habitude, une séance quotidienne avec une journée de repos intercalée jeudi.
Le stade d'Avranches, lui, essaie d'éliminer son manteau blanc. Hier et lundi, les bras n'ont pas manqué pour évacuer la neige. « Plus de trente personnes, dirigeants, bénévoles, joueurs et employés municipaux ont participé, se félicite le président Guérin. La Fédé viendra voir le terrain. Ça devrait aller. »
Une lecture affinée des bulletins météo pousse même à un relatif optimisme. Le redoux serait en vue. Quant aux conditions de jeu, elles seront probablement difficiles. « Je n'ai pas de crainte pour samedi. Le pelouse est abîmée mais ça jouera », affirme Gilbert Guérin, le président avranchinais.
L'entraîneur sud-manchot, lui, s'attend d'ailleurs dès maintenant à un dur combat : « Il faudra être costaud car Saumur va, je le crois, se montrer défensif et attendre pour aller si besoin jusqu'aux tirs au but. » Au bout du bout, la réception du Stade Rennais en 16e de finale tombera comme une énorme récompense. Les vainqueurs oublieront alors dans l'instant les contrariétés de la période préparatoire.
Vite, marquer un but !
Mais, dans un coin, un garçon a le sourire amer. « Oui, c'est vrai que cela me dégoûtait d'être là, habillé d'un jogging et absent de l'équipe pour un match comme ça... » Consolation pour Ramzi Tarchoun, celle d'être membre d'un club ne manquant pas de caractère. « On a un groupe doté d'un moral d'acier, reprend-il. D'ailleurs, on l'a bien vu à Cherbourg. Pendant une mi-temps, on prend le bouillon et puis Régis Pigeon débloque la situation et change la donne. »
Tarchoun le buteur, blessé le 18 octobre à Hérouville lors du 5e tour de la Coupe de France, ne pense donc plus qu'à une chose : revenir au top au cours des mois à venir. « Heureux de pouvoir maintenant retrouver l'équipe ? Évidemment... Car, deux mois et demi sans rien faire, c'est vraiment très long. Mais il y avait rupture partielle et je savais que la blessure demanderait du temps. »
Début décembre, Ramzi reprenait doucement l'activité physique mais ressentait encore une douleur. Point d'imprudence, Zivko Slijepcevic, l'entraîneur avranchinais jouait alors la patience, conscient que son canonnier serait des plus utiles lorsqu'il faudra gérer la seconde partie du calendrier. « Il y a vingt matches à disputer d'ici à la fin de saison », fait remarquer l'attaquant resté gourmand. Assez sur le papier pour oublier ce triste automne 2009. « J'attends impatiemment de jouer et de marquer. Ce sera mon plus beau cadeau de début d'année. Un but en coupe par exemple qui qualifierait l'US Avranches, magnifique non ? »
« Bientôt au top »
Les réalisateurs, on le répète souvent, fonctionnent au moral. Ils savent aussi qu'inexplicablement, se succèdent les périodes de réussite et de scoumoune.
Ainsi, en début de saison, quand tout le monde attendait beaucoup de son arrivée sous le maillot de l'USA, Ramzi Tarchoun mit du temps à enfiler son costume d'attaquant de pointe. « C'est vrai, reconnaît-il. Mais c'est au moment où je commençais à être bien, où je trouvais le bon rythme que j'ai eu ce gros problème musculaire. »
L'ex-meilleur buteur de CFA2 tourne donc la page, sourit à la vie et promet aux gardiens adverses de se rappeler à leurs bons souvenirs. « Je vais travailler physiquement, faire gaffe à ne pas me blesser, assure l'Avranchinais. Théoriquement, je devrais être au top pour le match retour de championnat à Caen. »
Un public gâté cette saison par l'accession de l'équipe de Slijepcevic en CFA et sa redoutable efficacité à domicile (4 victoires et 2 nuls), ainsi que sa faculté bien connue à s'adapter au contexte particulier de la Coupe de France. Au septième tour, la bande à Pigeon a renversé in extremis une situation largement compromise contre les Calédoniens de l'AS Mont-Dore ; au huitième, elle est allée humilier Cherbourg son grand rival manchot (0-3)...
« J'y crois vraiment... »
Après Sochaux (1993), Fécamp (1997), Boulogne (2005) et Dijon (2008), place donc à une nouvelle chance d'atteindre les seizièmes de finale et à l'espoir de devoir affronter une Ligue 1. « J'y crois vraiment, explique Stéphane Vaillant, défenseur latéral gauche. Il y a eu dans cette équipe une belle osmose. Entre nouveaux et anciens, l'état d'esprit a tout de suite été excellent. » Avec des garçons comme Didot (ex-Reims), Bourillon (ex-Besançon), Tarchoun meilleur buteur de CFA2 et Guyonnet (suspendu samedi), venu de Caen apporter son talent de récupérateur, l'US Avranches a donc pris du volume et compte se maintenir en fin de saison au niveau qui est le sien. La Coupe, c'est le plus qui remplit le vestiaire de bonheur de vivre et permet les paris les plus audacieux. Contre Saumur, dont on connaît le parcours (l'élimination des pros de Châteauroux vaut tous les avertissements), la motivation sera au top. Même si Patrice Sauvaget, l'entraîneur de Saumur, joue volontiers les modestes : « Avranches est milieu de tableau de CFA. Saumur, seulement milieu de tableau de CFA2. »
Devant une tribune dont les 653 places ont été vite louées et un public d'environ 2 000 supporters acquis à sa cause, l'USA veut écrire une page éclatante de son histoire et ne plus avoir à envier son adversaire du jour, opposé au FC Nantes voici cinq ans en seizième de finale.
Avranches - Saumur, 16 h, samedi.
US AVRANCHES : Louédec - Trinité, Lahaye, Bourillon, Vaillant - Ferreira, Feriaud, Restout, Pigeon - Roussel, Besnier. Entraîneur : Zivko Slijepcevic. Remplaçants : Radovic (g), R. Rouxel, Didot, Breillet (?), Perrigault, Tarchoun.
SAUMUR : Granger, Bresson (g) - Lardier, Louiron, C. Martin, Delbourg, F. Martin, A. Rosay (?), Tessier - Bouvier, Bouyain ou Epagneul, Dias, Houssard, Janin, Picault - Adipi, Chevalier (?), Nomer. Entraîneur : Patrice Sauvaget.