National. Jacques Philip (US Avranches) : « On réussit un exploit quasiment chaque semaine »

Les joueurs de l’US Avranches (Manche) se déplacent sur le terrain de Nancy (Meurthe-et-Moselle) pour la 16e journée du championnat de National, vendredi 15 décembre 2023. Ce dernier match de l’année 2023 sera primordial dans la lutte pour le maintien. Un déplacement auquel participera Jacques Philip, désormais administrateur de l’USA. Le Brestois de 60 ans, ex-défenseur pro de Lyon, Laval, Caen et Avranches, conseille les dirigeants depuis de nombreuses années.

Fin avril 2023, les joueurs de l’US Avranches (Manche, National) s’étaient lourdement inclinés (0-3) sur le terrain de Nancy (Meurthe-et-Moselle). Jacques Philip, administrateur du club manchois, se contenterait d’un match nul, ce vendredi 15 décembre 2023. | PHOTOPQR/L’EST REPUBLICAIN/MAXPPP

« Un match nul à Nancy me suffirait »

Comment abordez-vous ce match à Nancy ?

C’est un club qui vient de changer de coach, avec l’arrivée de Pablo Correa, il y a près d’un mois. La saison dernière, nous y avions fait un bon match, mais l’on s’était incliné lourdement (0-3, le 29 avril 2023). Ils sont sur une bonne série de deux victoires consécutives, alors faire un match nul là-bas me suffirait, personnellement, pour finir 2023 sur une bonne note.

Comment jugez-vous l’évolution du National ?

C’est devenu un championnat très complexe. En l’espace de quelques années seulement. Quand on voit les équipes et le niveau, on a le sentiment de réussir un exploit quasiment chaque semaine. En 1983, j’avais connu la D2 à deux groupes, et j’ai l’impression que l’on retrouve ce niveau, avec de nombreux joueurs de talent. Ces trois dernières années, on est même passés dans une autre dimension, sur les plans physique et technique. Et pourtant, nous sommes toujours là. Grâce au travail réalisé par Gilbert durant ces trois décennies, à l’image de la création du centre d’entraînement, qu’il a lancé, et qui est une véritable force pour le club.

« L’esprit de Gilbert Guérin est toujours là »

Quelles sont les autres forces de l’USA ?

L’expérience de Damien (Ott) et de son staff, le vécu de Xavier (Gravelaine), le bon recrutement de ses dernières saisons, avec par exemple Justin Smith, Victor Daguin, Goduine Koyalipou l’an dernier… Et il faut ajouter à cela qu’il y a, pour la deuxième saison consécutive, 6 relégations. Objectivement, si l’on regarde les budgets de chaque club, sur le papier, l’USA (2,4 millions d’euros) en fait partie. Mais, après, tu prouves l’inverse sur le terrain, grâce à la professionnalisation grandissante de notre structure. Sans compter que le bassin économique dans lequel nous évoluons n’est pas aussi élevé que pour des clubs comme Marignane, Rouen ou Villefranche, aujourd’hui en difficulté. Ce que l’on parvient à faire est donc admirable. Chaque détail est important et cela nous permet d’être dans la course, au côté de « grands » clubs, tout en conservant notre âme de club amateur.

Près de deux mois après son décès, Gilbert Guérin est en encore présent dans les têtes ?

Son esprit est toujours là. Les dirigeants continuent de travailler sur les fondations qu’il a bâties, apportant leurs propres pierres à l’édifice, aidés par les bénévoles. Tout en gardant, donc, cette âme de club amateur, des valeurs que j’aime. Chaque membre du club, à son niveau, fait preuve d’un état d’esprit admirable, loin de la mentalité de certains clubs pro.

Quel est votre nouveau rôle au sein de l’USA ?

J’en suis désormais l’un des administrateurs, depuis mi-novembre 2023 (il remplace Gilbert Guérin au CA, N.D.L.R.), mais ça ne change pas profondément mon rôle. Je m’inscris dans la continuité de ce qu’a réalisé Gilbert, étant un relais entre Xavier (Gravelaine), Damien (Ott) et Nicolas (Leroux, président), dans un vrai rapport de confiance. Je donne mon avis, constructif, je viens chaque semaine à l’entraînement, je suis avec l’équipe à chaque déplacement, je donne un coup de main… Mais je ne suis pas dans le cœur du réacteur, je ne prends pas de décision.

« Aujourd’hui, les joueurs pensent plus à l’économique qu’au sportif »

Quel regard portez-vous que l’évolution du foot professionnel ?

Aujourd’hui, les enjeux économiques sont devenus très importants. À mon époque, dès qu’on signait dans un club, on pensait qu’on ne bougerait plus. On réfléchissait à une carrière sur le long terme : de stagiaire à pro, de pro à la D2, de la D2 à la D1, puis envisager l’Équipe de France. Ça, désormais, c’est fini. Les joueurs pensent d’abord aux enjeux économiques plutôt qu’aux enjeux sportifs, pour dessiner leur carrière. C’est comme ça. C’est aussi pour ça que j’aime l’état d’esprit d’Avranches, ses valeurs, sa « fraîcheur », son attachement au Sud-Manche et à la région Normandie, à travers des partenaires locaux.

Et sur le plan purement « terrain » ?

Sur le plan tactique, on débat sans fin de 4-3-3, de 3-5-2, de 4-4-2… mais, à la base, nous sommes 11 joueurs contre 11 autres joueurs, et le but est de savoir ce que l’on doit faire lorsque l’on a le ballon, et quand on ne l’a pas. Il faut souvent commencer par ça, ce qu’on oublie de plus en plus. Les joueurs, eux, sont beaucoup mieux préparés, physiquement. Surtout, ils doivent être désormais complets dans tous les secteurs du jeu, et avoir un talent, un truc en plus, pour espérer percer au haut niveau.

Le groupe d’Avranches. Beuve, Launay, Bansais, Lemeray, Smith, Rabuel, Fofana, Daguin, Pierre, Tertereau, Fage, Magnon, Kerouedan, Jean, Nsimba, Remars. Entraîneur : Damien Ott.